Ou comment la découverte d’un Coffre-Fort au sous-sol du magasin UNIQLO au 17 rue Ferréol permet de raconter l’histoire coloniale et ses traces à Marseille?
Le Coffre-Fort de l’Empire est un projet permettant à la fois de rendre visible la mécanique économique que sous-tend l’entreprise coloniale française en Algérie mais aussi de documenter la manière dont des acteurs contemporains marseillais (associations, institutions, jeunes, scientifiques, militants) s’en saisissent pour organiser la confrontation collective à ce passé colonial et ses héritages.
Le Musée d’Histoire de Marseille a le plaisir de vous inviter à une soirée autour du projet Le Coffre-Fort de l’Empire
Ce projet vise à rendre visible la mécanique économique qui sous-tendait l’entreprise coloniale française en Algérie, tout en documentant la manière dont des acteurs contemporains marseillais – associations, institutions, jeunes, scientifiques, militants – s’en saisissent pour organiser une confrontation collective avec ce passé colonial et ses héritages.
18h – 19h30 | Musée d’histoire de Marseille Conférence autour du projet Le Coffre-Fort de l’Empire et de l’histoire de l’économie coloniale Avec :
Paul Max Morin, politiste Présentation du projet Le Coffre Fort de l’Empire
Samia Chabani directrice de l’association Ancrages, Révéler le patrimoine coloniale de la ville, l’apport des associations.
Xavier Daumalin, historien, co-directeur du projet Mars Imperium, L’économie coloniale à Marseille, le rôle de la Compagnie algérienne,
Témoignage audio des étudiants de Sciences po Menton. Projection de l’épisode réalisé par Histoires crépues sur la Compagnie Algérienne. En présence des élus de la Ville de Marseille
Rencontre organisée par les associations « Coudes à coudes », Amis du Monde diplomatique et LDH
10 octobre @ 15h00 – 21h00
Maison de la Méditerranée– Rue commandant Infernet
LES EFFETS DE LA COLONISATION
Avec l’historien Gilles Manceron, spécialiste de l’histoire coloniale Roland Biache, président de la LDH Toulon – la Seyne Quentin Dauphiné, professeur d’histoire en lycée Théo Tardy de la Fondation pour la Mémoire de l’Esclavage Exposition « C’EST NOTRE HISTOIRE » de la FME
La suprématie de l’occident : Hégémonie de la race blanche, accaparement des terres et esclavage.
L’impérialisme économique par la dépendance des peuples, par la force et sous couvert de droits.
L’indépendance sous contrainte et mise en place du néocolonialisme. Le racisme de fait.
Les effets visibles dans notre région et dans le Var en particulier. Traces de l’économie coloniale régionale.
Les dénominations d’espaces publics sont porteuses de charges symboliques puissantes, de sorte qu’on peut considérer qu’elles sont politiquement agissantes. De la « Rue Sergent Blandan » à la « Rue Taos Amrouche», la maire du 1e arrondissement de Lyon prend la plume, non pas à l’intention des polémiqueurs, mais de celles et ceux qui peuvent s’interroger, se questionner, douter.
Il n’est pas toujours utile de répondre à des controverses, encore moins à des attaques ou des insultes. C’est souvent perdre un temps qui serait mieux employé à autre chose, et s’exposer au risque de nourrir le troll, l’algorithme du clash. Pourtant, parfois, une réponse peut être l’occasion d’élaborer une pensée, non pas à l’intention des polémiqueurs, mais de celles et ceux qui peuvent s’interroger, se questionner, douter. C’est ce que je vais tenter de faire au sujet d’un micro-événement concernant le 1e arrondissement de Lyon, le changement de nom d’un bout de rue devant une école : l’extrémité ouest de la petite rue du Sergent Blandan est devenue « rue Taos Amrouche ».
Les dénominations d’espaces publics sont porteuses de charges symboliques puissantes, de sorte qu’on peut considérer qu’elles sont politiquement agissantes. C’est le parti pris que nous avons adopté à la mairie du 1e arrondissement de Lyon, en soutenant un effort de rééquilibrage des dénominations au profit des femmes, mais aussi des dominés de l’histoire, dont l’engagement contre les oppressions, pour les droits et la liberté méritent d’être honorés. Dans la méthode, nous avons souhaité que ces dénominations soient proposées et choisies par les habitantes et les habitants, ou sur proposition d’une association mobilisée, comme ce fut le cas pour Frantz Fanon.
S’agissant de la dénomination devant l’école Doisneau, l’initiative revient à la Commission Patrimoine de l’arrondissement, une instance participative dédiée à l’histoire du quartier, qui avait fait valoir qu’à l’occasion du réaménagement piéton d’une portion de la rue, il serait intéressant de lui restituer la dénomination qu’elle avait au début du 19e siècle, faisant référence à une boutique d’instruments de musique: rue Musique des Anges. Cette proposition n’a pas fait consensus, ni au sein de l’école, ni du conseil d’arrondissement : il a été décidé, alors, de solliciter d’autres propositions, en demandant un nom de femme en lien avec la musique. Les noms soumis ont été nombreux et divers, allant d’Anne Sylvestre à Clara Schumann en passant par Nadia Boulanger et Catherine Ribeiro. Parmi ces noms, celui de Taos Amrouche, qui n’était certainement pas la plus célèbre mais pas la seule méconnue. Une agente de la mairie a préparé un document de concertation en ligne, présentant chaque profil en quelques lignes, avec des liens pour écouter compositions et chansons lorsque cela était disponible. La concertation citoyenne a recueilli près de 1500 votes, ce qui est remarquable pour un sujet si petit et si localisé, concernant les abords d’une école. Chaque personne pouvait désigner trois choix, de sorte que le résultat final est issu d’un vote préférentiel : Taos Amrouche s’est distinguée de loin, avec plus de 700 voix sur son seul nom. Beaucoup en ont été surpris : comment, une femme qui n’est même pas lyonnaise, que personne de connaît, il y a forcément trucage ! Non, il y a eu mobilisation. Mobilisation d’un réseau d’associations culturelles kabyles très implantées à Lyon, en premier lieu l’Association Jean Amrouche (essayiste et frère de Taos Amrouche), gardienne de la mémoire de cette écrivaine de langue française, et chanteuse de langue kabyle. L’association avait organisé par le passé des événements pour faire connaître la figure de passeuse de culture qu’était Taos Amrouche, son travail de collecte de contes et de chants populaires, et ses interprétations lyriques originales. A côté de cette association, une autre, Awane, qui maintenait vivant cet héritage culturel kabyle avec une chorale à laquelle participaient des mamans d’élèves du quartier. Pour ces Françaises et Français d’origine kabyle, Taos Amrouche représentait cette double appartenance. Pour nombre de parents d’élèves sans aucun lien avec la Kabylie, ce sens était aussi puissant et significatif: « on trouvait que cela résonnait bien avec le métissage du quartier », m’a dit un papa au sujet de son choix. La communauté éducative (parents, enseignants, personnels de l’école) a massivement participé à cette concertation, et c’est avec elles et eux que l’inauguration s’est tenue le 16 septembre dernier, avec la participation de la chorale Tilawalin de l’association Awane, et du chanteur Azal Belkadi, « Pavarotti kabyle ». Un moment très émouvant et d’une grande beauté.
Il fallait restituer factuellement le déroulé de cette dénomination avant d’en venir aux attaques : « quelle honte, effacer la mémoire d’un soldat mort pour la France pour mettre le nom d’une femme qui n’est même pas Française! » (en fait, si) ; « vous voulez réécrire l’histoire, c’est de la manipulation politique » ; « on voit le projet d’islamiser la France » (par des chansons kabyles?); « c’est un couteau planté dans les racines de la France »… Cette dernière invective est une belle occasion pour rappeler une formule très juste d’Alexis Jenni : ce que l’on apprend de plus consistant sur les racines, c’est lorsqu’on parcourt Lyon, près des grands platanes qui font bomber le trottoir, « les racines, c’est ce sur quoi on trébuche.Voilà une bonne définition de la prétendue racine humaine, et qui explique qu’elle nous lance dans d’absurdes débats » (Parmi les arbres, p.29). Débats qui pourtant font tant de sens pour tant de personnes que des rayonnages entiers de librairies sont consacrés à cette question des racines et de l’identité nationale, et qui souvent trébuchent sur les complexités historiques du peuplement de la France, comme le montre magistralement l’archéologue Jean-Paul Demoule dans l’ouvrage qui vient de paraître, La France éternelle.
Mais plutôt que de chercher dans les arbres généalogiques et le séquençage ADN, reprenons sur le contentieux historique qui opposerait le Sergent Blandan à Taos Amrouche. Le Sergent Blandan est, comme l’indique une plaque patrimoniale de la ville, un « héros de l’armée d’Afrique », soldat né à Lyon en 1829 dans une rue proche de la place des Terreaux, d’un père limonadier, et qui s’est engagé comme des dizaines de milliers de personnes à l’époque dans la guerre de conquête coloniale de l’Algérie, sous le commandement du maréchal Bugeaud. Les combats étaient durs, Bugeaud considérait qu’il fallait asseoir la domination française par la force, sans négociation, et en menant une guerre anti-insurrectionnelle contre la population civile : massacres de villages entiers, destruction de cultures, déplacements forcés, « enfumades » des personnes réfugiées dans les grottes, utilisation de la famine comme arme de guerre. Des contemporains s’alarmaient de l’ampleur des victimes civiles, craignant que la population autochtone ne soit exterminée à l’issue de l’opération de Bugeaud (Ruscio, La première guerre d’Algérie). Au final, on estime que sur l’ensemble de la période de la guerre de conquête puis de période dite de « pacification » , près du tiers de la population algérienne a péri – mais l’armée française est parvenue à l’emporter sur la résistance algérienne, en mobilisant des contingents massifs. A l’époque à laquelle Blandan s’est engagé, environ cent mille soldats français combattaient sur le territoire algérien. Il fallait motiver les troupes, donner des exemples inspirants, susciter des vocations. Aussi, lorsque le Sergent Blandan est mort au cours d’une escarmouche dans la région de Boufarik, dans la plaine fertile de la Mitidja, son histoire a fait le tour des casernes: non seulement il a refusé de se rendre, mais il a combattu jusqu’à la mort, encourageant ses compagnons alors qu’il était lui-même blessé. Bugeaud ordonne qu’on érige un monument au lieu de sa mort. Son régiment honore sa mémoire. Un colonel en retraite se charge d’écrire un récit héroïque qui inspire tableaux, statues, et dénominations de lieux: une petite ville en Algérie, une rue à Lyon, où il est né. Il aura également sa statue à Lyon en 1900, place Sathonay, puis une caserne, devenue désormais un parc municipal. L’histoire de Blandan n’est pas bien connue de toutes et tous, mais elle imprègne les représentations, de façon plus ou moins consciente : par exemple, les jeux pour enfants du parc Blandan, conçus en 2013 autour de l’aventure dans un ancien fort militaire, s’appellent le Parcours de Reconquête et les Remparts.
Les dénominations de lieux véhiculent des imaginaires et des valeurs. Est-il illégitime de s’en préoccuper ? Non, au contraire, c’est une nécessité que de les questionner au regard des valeurs promues actuellement et inscrites dans notre Constitution, telles que l’antiracisme et le respect de l’égale dignité des personnes. Débaptiser des lieux, changer des dénominations, ce n’est pas effacer le passé, c’est réactualiser le sens qu’on donne aux récits du passé dans nos vies, c’est réactualiser l’inspiration que ces noms portent. Nous habitons la ville de façon oublieuse et néanmoins les histoires qui y sont inscrites participent aussi à façonner notre société et sa politique.
Comme maire du 1e arrondissement de Lyon, j’ai engagé un travail avec un groupe d’historiennes et historiens, d’anthropologues, et de responsables d’institutions de mémoire, pour apporter des éléments de contextualisation de la statue du Sergent Blandan, une information factuelle qui répare les occultations de l’histoire en donnant à voir les victimes de la propagande militaro-coloniale dont Blandan a été un instrument. En attendant, Blandan n’est ni effacé ni deshonoré. Simplement, parmi les différents lieux de Lyon qui portent son nom, sur une portion de rue, il cède la place à une femme issue de la population qu’il combattait. Une femme issue d’une lignée de femmes en résistance contre la violence du patriarcat, une femme qui a trouvé dans l’écriture en langue française une voie d’émancipation, tout en s’attachant à mettre en valeur et transmettre la richesse de sa culture kabyle. Une femme qui a incarné la rencontre et le métissage, l’ouverture, la paix. Une femme dont le nom aurait pu être choisi par une politique volontariste de remplacement de la mémoire du colonisateur par la mémoire du colonisé, mais qui, dans les faits, a été choisi par les citoyens et citoyennes elles-mêmes : ce qui est encore plus fort, car le sentiment est largement partagé qu’il est temps, effectivement, de cesser d’honorer dans nos villes les gloires coloniales qui nous renvoient à la guerre et à l’oppression, pour cultiver, ensemble, les bienfaits de la décolonisation.
Le Prix Lorientales 2025 a été décerné, ce samedi 13 septembre, à Guillaume Viry pour son roman L’Appelé, publié par les éditions du Canoë en septembre 2024. Le titre faisait face à quatre autres ouvrages sélectionnés par le jury.
La récompense salue depuis 2011 une œuvre publiée l’année précédente et traitant de l’univers oriental. Elle est portée par l’association Lorientales, ancrée au Pays de Lorient.
L’ Appelé figurait dans la liste des ouvrages finalistes de la distinction, après un « choix qu’il a été difficile de faire compte tenu de la qualité des dix préfinalistes », comme l’indiquait le jury au moment de la présentation de cette sélection restreinte.
Le livre raconte l’histoire de Jean, appelé militaire en Algérie en 1962. De son service à la guerre, jusqu’à son retour en France où, trente ans plus tard, il meurt dans un asile, centré sur une mémoire troublée. Un incident — la confusion d’un prénom — ravive alors un passé enfoui, une blessure longtemps tue, mais jamais vraiment guérie.
L’ Appelé incarne ainsi ce que le Prix Les Lorientales cherche : une œuvre capable de lier l’histoire et ses répercussions contemporaines, d’ouvrir des espaces de mémoire, de transmission, mais aussi de réveil. Le fait qu’il ait été élu au premier tour signale non seulement l’unanimité ou un soutien fort parmi les membres du jury, mais aussi que le texte avait, dès sa finaliste, un poids particulier par rapport aux rivaux.
Contribution pour le cinquantième anniversaire de la création du GPRA – Omar Benderra, Algeria-Watch, 18 septembre 2008 https://algeria-watch.org/?p=65168
Le 19 septembre 1958, en pleine guerre de libération nationale, le Gouvernement provisoire de la République algérienne (GPRA) a été proclamé au Caire par le Front de libération nationale (FLN). Pour marquer cette date importante, Algeria-Watch poste un texte de Omar Benderra, toujours d’une grande actualité.
Cinquante ans après sa création le 19 septembre 1958, l’actualité du Gouvernement provisoire de la République algérienne demeure dans le temps politique suspendu de la nation. Le GPRA reste pour de nombreux Algériens le seul gouvernement indiscutablement légitime qu’ait connu l’Algérie moderne. Le coup de force de 1962 contre l’expression gouvernementale de la révolution intenté par ceux-là mêmes qui devaient en assurer la protection marque encore douloureusement la réalité du pays. Le premier putsch mis en œuvre par ceux à qui le peuple et la révolution avaient confiés leurs armes fonde le régime qui entraîne l’Algérie dans une dérive sans issue. De fait, le système politique autoritaire de nature militaro-policière mis en place sous la menace des baïonnettes a perduré d’abord par la répression des libertés et en reprenant à son compte une histoire tronquée de la résistance du peuple algérien, ensuite, en particulier depuis juin 1991, par la brutalité nue et la force pure.
De crise en crise, du carnage des innocents au plus fort de la guerre contre les civils à la période présente de fausse opulence, de gabegie et de terrorisme « résiduel », la situation générale s’aggrave dangereusement et menace très gravement l’intégrité du pays et la souveraineté nationale. Le blocage politique voulu par ceux qui dirigent effectivement l’Algérie et l’annihilation de toutes les forces politiques susceptibles d’encadrer et de canaliser les revendications populaires met en jeu l’avenir national.
La gestion de la société par la violence et la guerre psychologique, en entretenant des divisions factices et en nourrissant les fausses contradictions en vue d’émietter et de fragmenter les luttes sociales et politiques, a abouti aujourd’hui à la quasi-disparition de toute forme d’organisation autonome, comme elle a débouché sur le délitement de l’État et la disparition de toute régulation sociale.
Tous en conviennent : nulle force organisée n’émerge publiquement pour se dresser contre la violence généralisée et radicalement destructrice que tout un chacun voit monter. Il ne s’agit pas d’élaborer des scenarii pour une catastrophe annoncée mais bien de tenter de la circonscrire à défaut de l’éviter.
Les objectifs premiers de l’appel du premier novembre 1954 ne sont toujours pas traduits dans la réalité. L’Appel du 1er novembre, qui demeure jusqu’à nouvel ordre constitutionnel, issu de la volonté de la volonté du peuple, l’unique texte incontestable sur laquelle est fondée la République algérienne, stipule en effet que le but de l’indépendance nationale est : « 1) La restauration de l’État algérien souverain, démocratique et social dans le cadre des principes islamiques. 2) Le respect de toutes les libertés fondamentales sans distinction de races et de confessions. » À l’évidence, le pays, ayant recouvré son indépendance formelle, n’a pas encore assuré la mise en œuvre du contenu primordial de l’indépendance nationale tel qu’énoncé en Novembre 1954. L’abandon des principes de l’Appel de Novembre 1954 par une organisation sans visage nullement embarrassée par un sens minimal de l’intérêt général a entraîné le pays dans la descente aux enfers de la déshérence et du désespoir.
Dans le système actuel il n’est d’avenir pour la jeunesse algérienne que dans la fuite suicidaire vers un étranger hostile, dans la subversion ou dans les marges de la délinquance et de la criminalité. Les conditions sociales, entre précarité et dénuement, de la vaste majorité du peuple algérien sont absolument inacceptables, particulièrement au regard du potentiel du pays, de son histoire, et de l’objet permanent de ses luttes.
La misère de millions d’Algériens est d’autant plus choquante qu’une minorité de privilégiés et de parvenus exhibent sans vergogne une richesse née des prébendes et des passe-droits. L’affairisme de bas étage et l’argent sale triomphent dans l’impudence et l’arrogance. Le bilan de la gouvernance est sans appel : cinquante ans après la création du GPRA, les libertés sont toujours piétinées, l’expression bâillonnée, l’action politique interdite, et seules les apparences de l’arbitraire ont changé.
Face à la corruption, à l’incurie et à l’incompétence érigées en mode d’exercice du pouvoir, il ne reste plus pour les citoyens niés dans leurs droits et empêchés de s’organiser, que le recours désespéré à l’émeute et au saccage. Le phénomène émeutier est ainsi entré dans le quotidien d’un pays en état de non-gouvernance.
La violence étatique qui tient lieu d’autorité réelle, dissimulée derrière le paravent d’institutions vidées de leur sens, est repliée sur elle-même, réfractaire à tout changement, et s’éloigne chaque jour davantage de la société. D’émeutes spontanées en révoltes localisées, l’Algérie semble se préparer à une rupture brutale et généralisée de l’ordre social actuel.
Une pareille éventualité ne relève pas de la pure prospective mais découle de l’analyse dépassionnée et de l’observation froide de la réalité. Si elle venait à survenir, une telle rupture pourrait bien emporter non seulement le régime, mais bien le pays tout entier dans une tourmente à l’issue totalement incertaine et aux implications imprévisibles.
L’ implosion du système de pouvoir et l’absence de tout encadrement alternatif des populations risque, comme dans d’autres pays, de l’Afghanistan à la Somalie en passant par l’Irak, de libérer des forces centrifuges et des fanatismes nourris et encouragés depuis de nombreuses années par les appareils d’intoxication du régime.
Dans une telle hypothèse et compte tenu de sa position géostratégique et du rôle de fournisseur énergétique du pays, rien n’interdit d’envisager que des interventions étrangères directes puissent avoir lieu sous des formes et des prétextes les plus divers. À ce stade, la seule défense effective contre de telles dérives réside bien dans la maturité politique de l’immense majorité du peuple. Il ne s’agit point d’alarmisme mais d’une analyse hélas commune et exprimée par de nombreux citoyens et citoyennes sincères et lucides. Il appartient donc à tous les militants de la cause nationale, au-delà de leurs divergences, de parvenir à dépasser le diagnostic et de s’organiser de toutes les façons possibles pour faire face à un danger réel susceptible de survenir sans préavis.
Dans un paysage politique dévasté, il n’y a pas d’homme providentiel, ni de leader charismatique ni d’idéologie unique et encore moins d’appareil politique exclusif en mesure d’encadrer les révoltes qui viennent. Les hommes politiques nouveaux, dans leur diversité, apparaîtront et les organisations s’imposeront, dans leur pluralité, au fil des circonstances.
Entre-temps, il incombe à tous de résister au sentiment d’impuissance et à la fatalité de l’échec dont veulent nous accabler ceux, qui au nom d’une lecture insuffisante de l’Histoire, voudraient faire accroire que le peuple n’aurait que ce qu’il mérite et qu’il y aurait un atavisme de la soumission et de la résignation propre aux Algériens. C’est bien mal connaître le passé d’un peuple qui, malgré les phases d’écrasement violent, a toujours su trouver en lui-même les ressources et les capacités de résistance à l’oppression.
La vigilance est plus que jamais nécessaire dans la perspective, hélas trop prévisible, d’événements graves et dangereux. Il ne s’agit nullement de la défense d’une ligne politique ou de la promotion de trajectoires individuelles. Au contraire, ce qui est en cause est l’objectif commun de tous les citoyens, le ciment de la volonté de vivre ensemble en droite ligne de l’Appel du 1er Novembre 1954.
L’unité nationale, le retour au droit et le rejet définitif de la violence en tant que moyen d’administration du pays constituent le socle institutionnel des libertés démocratiques. Comme le proclamait le GPRA dans sa déclaration inaugurale, le peuple algérien est un peuple pacifique. Mais qui ne s’est jamais résigné à l’injustice, l’Histoire en témoigne.
La seule possibilité qu’offrent les conditions actuelles est celle de l’organisation de tous sous toutes les formes démocratiques et non-violentes susceptibles d’être mises en œuvre. C’est par l’analyse sereine et l’organisation que pourra être refermée, avec le moins de dommages possibles, l’absurde parenthèse ouverte au cours de l’été 1962 par des aventuriers sans scrupule et avides de pouvoir.
Il sera temps alors d’achever enfin la mission du GPRA, de créer les conditions d’une consultation libre et démocratique du peuple pour définir les institutions de l’indépendance réelle.
Bonnes feuilles du livre de l’historien Benjamin Badier relatives au soutien du roi du Maroc à la lutte pour l’indépendance algérienne à partir de 1956.
Benjamin Badier publie en août 2025 Mohammed V, dernier sultan et premier roi du Maroc (Perrin), un livre tiré de sa thèse de doctorat soutenue en 2023. Au contraire de nombreuses hagiographies du « père de la nation » marocaine, père de Hassan II et grand-père de Mohamed VI, ce livre d’un historien restitue la complexité du parcours de ce sultan placé sur le trône par la France coloniale en 1927, déposé et exilé par elle en 1953, mais qui devint un acteur majeur de l’indépendance du Maroc puis un monarque autoritaire. Nous en publions ici les bonnes feuilles relatives aux rapports du roi d’un Maroc devenu indépendant en 1956 avec la guerre d’indépendance algérienne qui fait rage à ses frontières depuis novembre 1954. L’auteur y revient sur le soutien du pouvoir marocain à la lutte pour l’indépendance de l’Algérie, alors que les nationalistes marocains, algériens et tunisiens rêvaient d’une « unité du Maghreb arabe », mais il met aussi en lumière ses « ambiguïtés ».
La guerre d’Algérie vue du Palais marocain : entre retenue et soutien
Extrait de Mohamed V, dernier sultan et premier roi du Maroc (pp. 347-353)
Dès 1956, le Maroc s’engage en faveur de l’indépendance de l’Algérie[3]. Alors que les deux pays sont entrés en conflit dès 1963 et que leurs relations sont toujours houleuses soixante ans plus tard, il est bienvenu de rappeler que le Maroc a apporté son soutien à la cause algérienne avant 1962 et ouvert son territoire au FLN et à l’ALN. Ce soutien n’était cependant pas sans ambiguïtés.
La guerre a débuté alors que Mohammed V était en exil, mais la décolonisation des deux pays frontaliers est liée. L’insurrection du 20 août 1955 dans le Nord‐Constantinois en est une bonne illustration, puisque la date a été choisie en soutien au monarque exilé, alors que d’importantes mobilisations ont également lieu au Maroc. Le roi commence à s’intéresser à l’Algérie à l’été 1956, une fois les premières urgences de l’indépendance traitées, au moment où, après le Congrès de la Soummam (également un 20 août), le Conseil national de la révolution algérienne (CNRA) se met en place[4]. Jusqu’à la fin de son règne, la position du roi sur l’Algérie repose sur trois constantes : le désir d’une résolution pacifique, la réalisation des aspirations algériennes et le respect des intérêts de la France et des Français[5].
L’ engagement du sultan prend la forme d’une offre de service destinée à la France, formulée avec la Tunisie. Leurs bonnes intentions volent en éclats en octobre 1956, lorsque les autorités françaises choisissent de détourner l’avion des nationalistes algériens. La crise diplomatique qui s’ensuit accroît la détermination marocaine à s’engager en faveur de l’Algérie. Cependant, que l’indépendance de ce pays puisse advenir par la force ne peut séduire Mohammed V, car il craint l’instauration d’une république algérienne animée par un esprit révolutionnaire et socialiste. Une méfiance envers le FLN est de mise, du fait de la présence d’insurgés algériens sur le sol marocain, mais aussi de points de désaccord sur la question des futures frontières. Mais le monarque doit aussi tenir compte de l’opinion publique, favorable au FLN, tout comme les partis nationalistes.
Les cinq chefs du FLN avec le prince héritier Hassan devant l’avion marocain qui va être détourné par la France le 22 octobre 1956
Après la contre‐offensive française de 1956 et la mise en place des premiers barrages frontaliers, l’essentiel de l’ALN doit s’installer hors d’Algérie[6]. La wilaya numéro V prend ses quartiers dans les environs d’Oujda, où une communauté algérienne est présente de longue date. Il faut y ajouter les dizaines de milliers de réfugiés liés au conflit et plusieurs milliers de combattants. Le FLN est aussi implanté dans la plupart des grandes villes du pays. Des camps de formation ont été installés près de Nador, Khemisset, Larache et Tétouan[7]. Dans l’Est, les bases opérationnelles sont installées à Oujda, Boubeker, Berguent, Tendrara, Bou Arfa et Figuig, le long de la zone frontalière où des incidents entre l’ALM et l’ALN surviennent[8]. Le FLN est donc bien implanté dans les zones peu contrôlées par le pouvoir central marocain. Les deux principales figures algériennes au Maroc sont alors Abdelhafid Boussouf (1926‐1980), membre du Comité de coordination et d’exécution (CCE) à la tête d’un système de renseignements contrôlant les Algériens exilés au Maroc[9], et son second Houari Boumediene (1932‐1978), le futur président algérien, qui dirige les opérations militaires.
Les autorités marocaines préfèrent fermer les yeux sur cette présence algérienne, notamment pour éviter d’être tenues pour responsables par les Français. Elles tolèrent les livraisons d’armes au FLN, dont les cargaisons, très souvent en provenance d’Égypte, sont débarquées sur la côte nord, puis acheminées vers l’Algérie. De même pour la propagande algérienne qui circule dans le pays sans trop de contraintes. En revanche, les services secrets français n’ont jamais repéré d’aide financière directe du gouvernement marocain à la rébellion. Le soutien reste donc relatif.
Une première inflexion sur la question algérienne se fait sentir à l’été 1957. Dans un discours devant les ambassadeurs marocains, Mohammed V prononce pour la première fois le mot « indépendance » au sujet de l’Algérie[10]. Le 21 novembre suivant, au moment de la tenue de l’Assemblée générale de l’Onu, Maroc et Tunisie proposent à la France une nouvelle mission d’arbitrage[11], rejetée depuis la tribune de l’Onu par le ministre français Pineau. Face à ce nouveau refus, le Maroc accentue son soutien au FLN, alimenté par les agissements français durant la guerre. Après le bombardement de Sakiet Sidi Youssef en février 1958, la Tunisie cherche et obtient le soutien marocain[12]. Le roi assure au président Bourguiba que la « question algérienne » est l’une de ses priorités. Elle contraint les deux pays à se tourner vers l’idée d’un front maghrébin uni avec le FLN. Mais Mohammed V souhaite rester dans une posture de conciliation, tout en se prononçant pour l’indépendance :
Nous désirons une solution rapide, pacifique et politique du problème algérien pour ne pas être condamné bientôt au choix dramatique entre les impératifs de la fraternité et les obligations de l’amitié […]. Nous ne pourrions maintenir plus longtemps Notre réserve actuelle si le problème algérien ne reçoit pas une solution qui donne satisfaction aux aspirations nationales du peuple algérien et lui reconnaisse sa liberté et sa souveraineté […][13].
L’ unité maghrébine est l’objet de la grande conférence qui se déroule du 27 au 30 avril 1958 à Tanger[14]. Elle ne réunit pas les États, mais les partis nationalistes, l’Istiqlal, le Néo‐Destour et le FLN. Le roi du Maroc, alors absorbé par la crise politique en cours dans le pays (chute du gouvernement Bekkai), ne joue aucun rôle dans la conférence, mais elle a son aval. Face à la menace que représente la France pour la souveraineté des États nord‐africains, la conférence propose « l’unité maghrébine ». Les difficultés des trois pays, la guerre d’Algérie, la présence militaire postcoloniale ou encore les revendications territoriales sont considérées comme un tout. Les résolutions réclament la reconnaissance immédiate de l’indépendance de l’Algérie et la mise en place d’un fédéralisme maghrébin. Ce pan‐maghrébisme s’inscrit dans le souvenir de l’Étoile nord‐africaine de l’entre‐deux‐guerres ou du Comité de libération du Maghreb arabe formé au Caire en 1948 derrière Abdelkrim et recréé par Nasser en 1954. Il s’inspire aussi de la République arabe unie (RAU) créée derrière Nasser en février 1958, incluant l’Égypte et la Syrie et avec laquelle il s’agit de rivaliser au sein du monde arabe.
Mais le projet a tout d’une chimère, car les trois partis nationalistes et les gouvernements ont peu intérêt à mettre en forme ce projet[15]. Au Maroc, le roi‐commandeur des croyants conçoit mal une alliance fédérale avec la république bourguibienne. Le retour au pouvoir de De Gaulle en France en mai 1958 change aussi la donne, car Maroc et Tunisie préfèrent attendre ses décisions sur l’Algérie. La conférence suivante, qui se tient à Tunis du 17 au 20 juin et qui réunit cette fois les gouvernements (mais toujours pas le roi), constitue selon G. Meynier un « coup d’épée dans l’eau[16] ». Après 1958, il n’y a plus de grande rencontre tripartite et les rapports deviennent plus fuyants.
Une autre preuve de l’engagement retenu du Maroc et de son roi est apportée en septembre 1958, lorsque le Gouvernement provisoire de la République algérienne (GPRA) est fondé. L’une de ses priorités est d’être reconnu par les deux pays voisins[17]. Le président du Conseil Balafrej prend alors contact avec l’ambassadeur de France au Maroc pour s’excuser par avance : son pays est contraint de reconnaître le gouvernement algérien, parce qu’un choix contraire ne serait pas compris dans le monde arabe, parce que la sécurité du pays pourrait être compromise en raison des dizaines de milliers d’Algériens qui y vivent et parce que l’opinion publique marocaine y est très favorable[18]. Mohammed V fait aussi tout pour atténuer la portée de cette reconnaissance. Il refuse qu’un représentant officiel du GPRA s’installe à Rabat – alors que la ville a un temps été envisagée comme capitale du gouvernement exilé – et s’arrange pour que le Maroc ne soit pas le premier pays à le reconnaître. La France est sensible à ces précautions.
Mohammed V recevant au Palais royal de Rabat des ministres du Gouvernement Provisoire de la République d’Algérie (GPRA) le 28/09/1959 (Photo @afpphoto)
Dans les mois qui suivent, les contacts se multiplient cependant entre le Palais et le GPRA. Mohammed V reçoit ses représentants à Rabat, notamment les ministres Abdelhafid Boussouf et Abdelhamid Mehri et son président Ferhat Abbas, accueilli comme un chef d’État en novembre 1958, novembre 1959 et mai 1960. Mais les audiences qu’il accorde sont courtes et peu engageantes, voire tendues. Le GPRA a conscience de la gêne du Palais et souligne dans un rapport d’octobre 1958 l’écart entre les paroles et les actes[19]. Le Palais et l’Istiqlal, après sa scission en 1959, craignent une possible collusion entre le FLN et les éléments républicains au Maroc, notamment l’UNFP. Après 1958, le militantisme algérien est plus qu’avant encadré sur le sol marocain[20]. Les armes continuent de transiter par le nord, mais le Palais intervient pour interrompre les trafics dès qu’ils sont révélés par la presse française.
Depuis que les FAR ont remplacé l’ALM dans le Tafilalt ou l’Oriental et que l’armée française s’est repliée, les incidents frontaliers mettent l’armée marocaine aux prises avec l’armée française en Algérie autant qu’avec les nationalistes algériens. Le nombre croissant de combattants algériens sur le territoire marocain (peut‐être cinq mille fin 1960) fait craindre au gouvernement marocain une contagion de la guerre d’Algérie dans la province d’Oujda[21]. Aussi, toute initiative en faveur d’une résolution pacifique du conflit a‐t‐elle la faveur du Palais. Le roi se rallie à la politique d’autodétermination annoncée par de Gaulle à partir de septembre 1959, dont le principe a également été accepté par le GPRA.
Mohammed V, Gamal Abdel Nasser, Ferhat Abbas, lors de la réunion du Groupe de Casablanca en 1961
Mais la position du Maroc se durcit en 1960. C’est le reflet d’un tournant politique général après la mise en place d’un gouvernement présidé par le roi (mai 1960), mais aussi d’un rapprochement avec les pays socialistes et d’un engagement plus explicite en faveur de la décolonisation, en particulier en Afrique. Le 31 mai 1960, un protocole d’accord est signé entre le gouvernement marocain et le GPRA, qui régularise la présence du FLN au Maroc[22]. À l’automne 1960, Mohammed V milite pour que la question algérienne soit inscrite à l’ordre du jour de l’Assemblée générale des Nations unies[23]. Dans un contexte de fortes tensions avec la France, le soutien à l’Algérie apparaît aussi comme un moyen de faire pression sur l’ancienne puissance coloniale sur le dossier mauritanien. Le 1er novembre 1960, pour le sixième anniversaire du déclenchement de la guerre d’indépendance, une journée de solidarité avec l’Algérie est organisée et largement suivie au Maroc. La veille au soir, le roi prononce à la radio un discours enflammé contre le colonialisme et les menées néocoloniales :
Le jour de l’Algérie est notre jour, sa cause est notre cause. […] La libération de l’Algérie est une question de vie ou de mort pour nous ; elle nous importe au plus haut point, car elle est la plus sûre garantie de l’indépendance de notre pays, de l’unité du Maghreb arabe et de la liberté de tout le continent africain[24].
L’ actualité sanglante en Algérie lui donne l’occasion d’exprimer de nouveau son soutien en décembre 1960, à la suite de la répression des manifestations en Algérie[25]. Mohammed V n’a jamais été aussi engagé derrière la cause algérienne que dans les toutes dernières semaines de son règne, mais il meurt avant l’indépendance du pays.
[3] M. Essemlali, « Le Maroc entre la France et l’Algérie (1956‐1962) », Relations internationales, vol. 146, n° 2, 2011, p. 77‐93 ; C. Rogerro, L’Algérie au Maghreb. La guerre de libération et l’unité régionale, s. l., Mimésis, 2014.1
[4] S. Thénault, Histoire de la guerre d’indépendance algérienne, op. cit., p. 87.
[5] « Discours prononcé par Sa Majesté lors de son entrée officielle à Oujda », 25 septembre 1956, dans Mohammed V, Le Maroc à l’heure de l’indépendance, op. cit., p. 131 ; Direction générale des Affaires marocaines et tunisiennes, « Mohammed V et le problème algérien », 25 juillet 1959, CADLC, 24QO‐944.
[6] G. Meynier, Histoire intérieure du FLN, 1954-1962, Paris, Fayard, 2002, p. 556 ; C.‐R. Ageron, « Un versant de la guerre d’Algérie : la bataille des frontières (1956‐1962) », dans Genèse de l’Algérie algérienne, Saint‐Denis, Éditions Bouchène, 2005, vol. 2, p. 641‐654 ; S. Arezki, De l’ALN à l’ALP. La construction de l’armée algérienne (1954-1991), Paris, Éditions de la Sorbonne, 2022, p. 134.
[7] « Le camp de Khemisset », février 1959, CADLC, 24QO‐943 ; « Organisation et action du FLN au Maroc », avril 1958, CADLC, 24QO‐ 942.
[8] État‐major général de la Défense nationale, « L’aide du Maroc à la rébellion algérienne », 26 mai 1959, CADLC, 24QO‐943.
[9] G. Meynier, Histoire intérieure du FLN, op. cit., p. 339.
[10] « Communiqués publiés à la suite de la Conférence des ambassa‐ deurs », 20 juillet 1957, CADLC, 24QO‐942.
[11] Communiqué commun publié à la suite de l’entrevue S. M. Mohammed V – S. E. Habib Bourguiba, 21 novembre 1957, CADLC, 24QO‐1107.
[12] Lettre de Bourguiba à Mohammed V, 15 février 1958, et réponse, 18 février 1958, DAR, A21‐027.
[13] Direction générale des Affaires marocaines et tunisiennes, « Mohammed V et le problème algérien », 25 juillet 1959, CADLC, 24QO‐944.
[14] M. Connelly, L’Arme secrète du FLN, op. cit., p. 299 ; C. Rogerro, L’Algérie au Maghreb, op. cit., p. 70.
[15] La Documentation marocaine, « Maghreb arabe uni. Conférence de Tanger, 27‐30 avril 1958 », DAR, A21‐027.
[16] G. Meynier, Histoire intérieure du FLN, op. cit., p. 567.
[17] Lettre de F. Abbas, président du GPRA au roi du Maroc, depuis Le Caire, 19 septembre 1958, DAR, A21‐028.
[18] Télégramme de Parodi, au MAE français, 18 septembre 1958, CADLC, 24QO‐942.
[19] Document n° 93, 1er octobre 1958, M. Harbi, Les Archives de la Révolution algérienne, Paris, Jeune Afrique, 1981, p. 429‐445.
[20] « Note sur l’attitude du Maroc à l’égard du FLN », 23 juin 1959, CADLC, 24QO‐943.
[21] Télégramme de Seydoux au MAE français, 6 décembre 1960, CADLC, 24QO‐945.
[22] Document n° 96, 30‐31 mai 1960, M. Harbi, Les Archives…, op. cit., p. 458‐461 ; C. Rogerro, L’Algérie au Maghreb, op. cit., p. 135.
[23] Lettre publique de Mohammed V à son fils Hassan, 19 septembre 1960, dans Mohammed V, Le Maroc et l’Afrique, op. cit., p. 13.
[24] Mohammed V, Inbi‘âth umma, t. 5 : 1959-1960, op. cit., p. 226.
[25] Mohammed V, Inbi‘âth umma, t. 6 : 1960-1961, op. cit., p. 33.
La Ville de Lyon, Coup de soleil en Auvergne-Rhône-Alpes et l’Association culturelle Franco-Maghrébine organisent les 3 et 4 octobre 2025 à Lyon un colloque consacré aux mémoires et à l’histoire des harkis et de leurs familles et descendants.
Les harkis, de la mémoire à l’histoire ?
Cette manifestation est soutenue par l’Office National des Combattants et Victimes de Guerre et l’Académie de Lyon. Ces journées prennent place dans la suite des rencontres mémorielles franco-algériennes que Coup de Soleil en Auvergne-Rhône-Alpes et différents partenaires organisent depuis 4 ans avec le soutien de la Ville de Lyon. Elles se tiendront dans les salons de l’Hôtel de Ville de Lyon, avec une présentation de l’exposition de l’ONaCVG sur les harkis.
Vendredi 3 octobre
14h Accueil du public
14h30 Mot d’accueil et d’ouverture par Monsieur le Maire de Lyon, en présence de : – Arnaud Papillon, chef du département de la mémoire de l’ONaCVG ; – Tramor Quemeneur, historien et directeur de projet, chargé des questions mémorielles sur la colonisation et la guerre d’Algérie, à la présidence de la République française ; – Fatma Kefif, présidente de l’Union nationale des anciens combattants français musulmans et leurs enfants ; – Esma Gaudin Azzouz, présidente, et Michel Wilson, vice-président de l’association Coup de Soleil en Auvergne-Rhône-Alpes.
15hRevenir sur l’histoire des harkis : quels enjeux ? La difficile émergence de l’histoire des harkis en France, Abderahmen Moumen, historien, chercheur associé à TELEMMe (Université de Provence), membre du conseil scientifique du Mémorial du camp de Rivesaltes, il est spécialiste de la guerre d’Algérie et des enjeux mémoriels.
16hLes harkis. Les raisons d’un long silence, Mohand Hamoumou, sociologue, président d’AJIR pour les Harkis (Association Justice Information Réparation), docteur en sociologie (EHESS), diplômé de l’Essec et en droit, a été successivement instituteur, enseignant à l’Université et en Grandes Ecoles, DRH au sein de deux groupes internationaux, et maire de Volvic. Membre du conseil scientifique de la Fondation de la guerre d’Algérie et des combats du Maroc et de Tunisie, il est l’auteur de la première thèse publiée sur l’histoire des Harkis.
17hL’histoire des harkis du point de vue de l’Algérie, où en est-on ?Pierre Daum, journaliste, ancien collaborateur de Libération, il est l’auteur de Ni valise ni cercueil, les Pieds-noirs restés en Algérie après l’indépendance, avec une préface de Benjamin Stora (Actes Sud, 2012) et signe en 2015, toujours chez Actes Sud, Le dernier tabou. Les « harkis » restés en Algérie après l’indépendance, poursuivant ainsi ses travaux sur les zones d’ombres du passé colonial de la France.
19hau cinéma voisin l’Opéra, 6 rue Joseph Serlin :
Projection du film de Philippe Faucon, Les harkis Le débat qui suivra sera animé par Tramor Quemeneur, Historien, enseignant à l’université Paris-8, spécialiste des questions mémorielles sur la colonisation et la guerre d’Algérie et auteur de plusieurs ouvrages sur le sujet. Il est directeur de projet, chargé des questions mémorielles sur la colonisation et la guerre d’Algérie, à la présidence de la République française, et secrétaire de la commission mixte d’historiens français et algériens.
Samedi 4 octobre 2025
10hLes cimetières harkis dans les camps, Saint-Maurice l’Ardoise, Rivesaltes Table ronde animée par Abderahmen Moumen, historien Lucie Peytermann, (journaliste, AFP) – en visioconférence – Grand reporter à l’AFP, autrice d’une enquête sur les cimetières oubliés des enfants harkis. Nadia Ghouafria, Présidente de l’association Soraya, elle s’investit dans la préservation de la mémoire des harkis et se bat pour que le cimetière oublié de Saint-Maurice-l’Ardoise soit retrouvé et réhabilité. Marie Gougache, Collectif des familles de disparus de Rivesaltes et Perpignan, Présidente d’AJIR pour les Harkis Ile de France
11h Les mobilisations Table ronde animée par Michel Wilson (Coup de soleil)
Katia Khemache, 1975, 1991, La révolte de la « seconde génération ». Docteure en histoire et professeure d’histoire-géographie en Gironde, Katia Khémache a adapté une partie de sa thèse sur La relation entre les pouvoirs publics français et la population harkie lot-et-garonnaise de 1962 à nos jours : Regards sur des pratiques administratives postcoloniales. Said Mérabti, militant associatif. De la Marche pour l’égalité et contre le racisme au militantisme harki. Saïd Merabti, né pendant la guerre d’indépendance, fils de harki exilé en 1962, a grandi dans les quartiers Nord de Marseille. L’engagement a été l’une des constantes de sa vie de citoyen. Outre des mandats syndicaux et politiques, il a assumé successivement, et sans contradiction, la défense de la culture berbère, les combats antiracistes et les revendications de reconnaissances des familles harkies. Mohamed Haddouche, militant associatif. Mohamed Haddouche a milité dans des associations de et pour les Harkis : CFMRAA de feu M’hamed LARADJI, au CNMF avec André Wormser, à Génériques (une association qui travaillait sur l’histoire des populations venues d’ailleurs en France) et à AJIR (cofondateur, ancien Président, actuellement trésorier). Il est actuellement président du Fonds de dotation pour la mémoire des harkis.
Charles Tamazount. L’action juridique pour faire droit. Président du Comité Harkis et Vérité, avec son frère, il a fait condamner la France par la Cour européenne des droits de l’homme pour les conditions de vie indignes dans les camps qui les ont accueillis après l’indépendance de l’Algérie.
12h30 Buffet payant préparé par l’association Cannelle et Piment, sur réservation
14h Les harkis dans les arts Table ronde animée par Just Jolivet (ONaCVG)
Vincent Marie, historien, Les harkis dans le cinéma. Titulaire d’un doctorat liant histoire et bande dessinée, commissaire d’expositions, directeur de publication, cet agrégé d’histoire enseigne le cinéma au lycée Philippe Lamour de Nîmes et la sémiologie de l’image à l’Université de Montpellier 3
Fadhela Benammar-Koly, Le travail sur les tisseuses de Lodève. Vice présidente de la communauté de communes de Lodève, conseillère régionale, Fadelha Benammar-Koly milite pour garder trace de l’histoire des femmes d’anciens harkis à l’origine de la manufacture de tapis de Lodève.
15h Les harkis en images Table ronde animée par Pierre-Jérôme Biscarat (ONaCVG) Vincent Marie
Axel Graisely ou Lobé, auteurs de « Les harkis, une tragédie française », éditions Présence 2023 (à confirmer)
16h Projection du documentaire « Le mouchoir de mon père ». Avec Farid Haroud, réalisateu
Farid Haroud est Journaliste pour la télévision, réalisateur de documentaire et auteur. Dans son documentaire, il revient sur l’histoire douloureuse de son père.
Les deux historiens membres de la rédaction d’histoirecoloniale.net échangeront et répondront à vos questions. Prenez vos billets !
Fabrice Riceputi et Alain Ruscio lors d’une conférence commune en 2024 à Toul sur la torture en Algérie
Rendez-vous avec histoirecoloniale.net :
La France et l’Algérie, de Bugeaud à Retailleau : une rencontre interactive en visio avec Alain Ruscio et Fabrice Riceputi le 3 octobre à 20 h
En mars dernier, évoquant des « Oradour » en Algérie, le journaliste Jean-Michel Aphatie faisait éclater au grand jour un phénomène bien connu des historiens du colonial et du postcolonial : la persistance, en dépit de leurs nombreux travaux, d’un solide déni national sur ce que fut réellement l’histoire coloniale de l’Algérie et, plus largement, celle de la colonisation en général. Davantage, la polémique a vu ressurgir chez certains des tentatives de réhabilitation du colonialisme, dans des temps où, de Trump à Poutine en passant par Netanyahou, se produit dans le monde un inquiétant revival du colonialisme et de l’impérialisme.
Les historiens Alain Ruscio et Fabrice Riceputi, tous deux historiens du colonial et membres de la rédaction d’histoirecoloniale.net, échangeront sur ces questions en visio et en direct le vendredi 3 octobre à 20 h.
L’inscription – à prix libre – est nécessaire. Elle se fait en cliquant sur ce lien. Vous recevrez alors une adresse électronique pour poser des questions à l’avance, puis vous pourrez également intervenir ensuite sur le tchat de Zoom.
De l’insurrection de 1871 à l’apparition des formations nationalistes dans l’entre-deux-guerres, l’Algérie entre dans une période de colonialisme triomphant. L’administration se renforce, les terres sont massivement transférées à des colons européens et l’ordre semble régner sur ce territoire colonisé.
Pourtant, à y regarder de plus près, la vie rurale reste rythmée par une vive conflictualité sociale. Les usages des territoires forestiers font l’objet d’affrontements âpres. Les terres confisquées continuent souvent d’être occupées. Et surtout, un banditisme rural émerge et ne cesse de préoccuper l’administration coloniale. Dans les années 1890, les autorités considèrent le banditisme comme le ferment potentiel d’une insurrection. Cette résistance perçue suscite une réaction répressive qui se heurte à une sourde hostilité de la société rurale qui met régulièrement en échec les tentatives de destruction des bandes. Primes de dénonciation ou de capture, internement des familles de bandits, campagnes militaires, condamnation au bagne ou à la peine capitale sont quelques-unes des mesures prises pour venir à bout des résistances à son autorité. Cet ouvrage cherche à suivre pas à pas ces bandits ruraux, de leur prise d’armes ou de leur fuite face à l’administration coloniale jusqu’à leur ultime souffle, de leur ancrage dans un territoire rural en proie à la dépossession à leur transportation au bagne. Ces trajectoires conflictuelles sont scrutées au travers d’un ensemble de sources allant des archives de la répression à la poésie populaire en passant par la presse et des correspondances privées.
Remerciements Préface de Sylvie Thénault Glossaire
Introduction – Une histoire des bandits en Algérie colonisée
Chapitre 1 – Fronts de dépossession et conflictualités rurales Chapitre 2 – Vivre en bandit Chapitre 3 – Une société coloniale révélée par un banditisme pluriel Chapitre 4 – État, bandits et ordre informationnel Chapitre 5 – Écraser le banditisme : la mise en scène du maintien de l’ordre colonial Chapitre 6 – Éloigner les bandits : la diaspora des indésirables Chapitre 7 – Désertion, insoumission et banditisme dans la Première Guerre mondiale Chapitre 8 – Insurrection et banditisme
Conclusion Présentation des sources Bibliographie Index des noms de lieux Index des noms de personnes Tables des figures et encadrés